La
controverse Newton (Clarke)-Leibniz

Troisième
attaque de Leibniz
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Leibniz est irrité par le second écrit de Clarke: l'espace et le
temps absolus sont, pour Leibniz, des idoles. Mais il est vrai
que l'attaque de Clarke vise le rationalisme intégral de Leibniz.
Leibniz
critique maintenant le concept d'espace absolu en essayant
de montrer qu'il y a une contradiction entre :
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Le
fait que l'espace est infini et le temps éternel, et qu'il
est donc un attribut de Dieu quand ce n'est pas carrément
son essence.
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D'autre
part, que l'espace et le temps absolu seraient divisibles,
puisque composés d'espaces et de temps relatifs. Ceci introduit
donc une division en Dieu, ce qui est absurde puisque Dieu
est un être spirituel.
Vision
de Dieu assez contestable à mon sens !
M'enfin, c'était l'époque...
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Quant à la question d'un Dieu qui agit de par sa pure volonté libre,
Leibniz pense qu'elle est aussi absurde. Pour choisir, il faut avoir
devant soi des raisons. On ne choisit pas dans le vide. Il reproche
donc à Newton une volonté divine qui serait l'expression d'une liberté
d'indifférence. Dieu choisirait sans raison, selon son bon vouloir.
Le
théologien allemand Jürgen
Moltmann
est très sévère à l'égard de ce Dieu newtonien
-qui est aussi le Dieu cartésien-
où la liberté n'est pas fondée sur le bien ou l'amour,
mais sur une sorte de volonté toute-puissante, purement gratuite.
Quand l'homme reprend cette idée pour exprimer sa domination sur
la nature, dit Moltmann,
il crée une extériorité entre lui et la nature
et c'est ce qui a conduit à la crise écologique d'aujourd'hui...
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Leibniz ajoute que, dans la perspective newtonienne, si le monde
est abandonné à lui-même, alors la force motrice de l'univers diminue
et l'univers se dégrade... L'univers, selon les newtoniens, est
donc soutenu par un miracle permanent. L'origine du chaos
dans la nature n'est donc pas naturelle et apparente, mais elle
se situe en Dieu lui-même qui a créé ce monde.
Là,
nous touchons un problème très grave (donc passionnant)
et très moderne :
La
structure ordonnée de l''univers, selon les newtoniens,
est maintenue par l'intervention permanente de Dieu. Notamment
l'architecture des structures complexes, vivantes etc. Ce
problème rebondira sur celui de la permanence et de l'évolution
vivante sujettes à la dégradation entropique. En effet,
Newton, Descartes, Leibniz n'ont pu voir de leur temps, que
l'application stricte des lois de la mécanique entraîne une
dégradation des systèmes -fermés bien sûr, ou proche de l'équilibre
thermodynamique-.
Troisième
réponse de Clarke
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Les newtoniens vont protester contre l'accusation de Leibniz selon
laquelle ils font de l'ordre dans la nature un miracle perpétuel.
Mais ils vont toutefois défendre le fait que le mouvement circulaire,
dû à l'attraction des objets les uns sur les autres, est le résultat
de l'action divine : en effet la nature du mouvement impose que
l'objet continue sur sa lancée en ligne droite. Il en résulte que
pour briser ce mouvement naturel, il faut une attraction : cette
attraction est une action divine permanente.
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Clarke-Newton continuent à penser que Dieu choisit indifféremment
entre différents cas possibles.
On
commence à s'entêter, chacun de son côté.
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L'espace absolu n'est pas Dieu, mais l'espace infini ou plutôt l'immensité
(nouveau concept). Cet espace est indivisible. Clarke dira que l'on
abuse trop ici du mot de "parties" de l'espace.
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Quant au temps selon Clarke, il ne peut être un ordre de succession.
Car Dieu aurait pu créer le monde avant ou après, quand il le voulait
Derrière
cela se cache une question que l'on entend souvent:
qu'y avait-il avant
le Big Bang ?
Cette question est typiquement newtonienne...
