L'article présent sera découpé en deux parties, pour ne pas être trop lourd à lire. Il a été écrit dans un café,
proche du sommet du Grand Colombier, dans l'Ain, face à un panorama où la variété des couleurs et des parfums rejoignait la
majesté d'un paysage de montagnes.
*
Quand j'étais adolescent, un vieux parent m'avait affirmé qu'être attiré par la mystique ou la spiritualité relevait de la sentimentalité primitive, si ce n'est d'un reste d'animalité non encore
parvenu à l'humanité vraie et authentique. Et il ajoutait que la raison adulte saurait résorber cet état transitoire.
La fréquentation, par la raison philosophique, d'un certain nombre d'auteurs "adultes" et plus que "raisonnables"
m'a informé de la prudence à garder à l'égard des affirmations précipitées. Le "feeling" anglo-saxon, le "je ne sais quoi" imperceptible mais dense "d'être", la "sensibilité" notamment artistique, intuitive, ou l'affinité de l'amitié, ne
sont pas des états de perception inférieure à la raison. Ils manifestent au contraire une subtilité indéfinissable que seuls les êtres évolués, organiquement parlant, peuvent soupçonner,
expérimenter et mettre en oeuvre. Une subtilité qui leur permet à la fois d'échanger de l'information de plus en plus complexe, et de se différencier individuellement. Du point de vue animal, les mammifères se différencient et communiquent entre eux, en tant qu'individus, beaucoup plus subtilement que des reptiles ou des
insectes. A fortiori les femmes et les hommes, dont les visages, le langage et les oeuvres artificielles et culturelles dévoilent un espace qualitatif (une "noosphère") nouveau,
ontologiquement parlant !... n'en déplaise aux naturalistes qui cherchent à tout prix à réduire la spécificité humaine à quelque appendice de la chaîne de l'évolution.
Je ne nie pas qu'il puisse exister des formes de spiritualité ou de mystique, voire de sentimentalité, qui soient
en deça d'une raison dite adulte... et Dieu sait que j'en ai rencontré ! Hystériques, hallucinés ou (parce que je les place dans la même catégorie) soumis,
bigots, intégristes, fondamentalistes et bénis-oui-oui. Sans doute le corps (et ses pulsions) s'exprime-t-il avec une violence physique ou verbale (contre soi-même ou contre les autres) qui
le recouvre dès qu'il se sent en danger. Le corps, naturel ou humanisé, vit en effet plus proche de l'être que l'esprit, au sens philosophique, et il le déborde, même. Laissons cela de côté.
Ce qui m'intéresse ici, c'est la perception sensible qui est au-delà de la raison : l'esprit de finesse, disait Pascal quand il montrait que le coeur a ses
raisons que la raison ne connaît pas.
Épistémologiquement parlant, l'existence de cette connaissance (et inconnaissance) supérieure n'est pas difficile
à démontrer. Elle a fait l'objet de toute ma recherche depuis plus de trente ans, et aujourd'hui elle ne pose plus de doute sérieux à ma conscience philosophique. Elle s'articule sur
l'expérience de la vie du corps existant, corps sensible et corps historico-social, ainsi que de la vie de l'esprit, qu'un pur logicien ou un pur mathématicien sans corporéité, doté d'un simple
arsenal formel et d'un réseau de concepts, ne peut connaître.
Je vais tenter de la symboliser à travers deux analogies : la première est celle de l'amitié, la seconde celle de la création artistique. Ces analogies ne sont naturellement pas exhaustives. Elles sont
inspirées en partie par le souvenir revisisité d'un roman extraordinaire, "Narcisse et Goldmund" de Hermann Hesse, que le lecteur
devra lire et imaginer derrière les lignes qui suivent.
*
Je me suis aperçu un jour, avant de l'expérimenter moi-même, que l'amitié n'est pas seulement une rencontre
d'affinités ou une reconnaissance réciproque du "Soi" de chaque personne ("parce que c'était lui, parce que c'était moi", disait Montaigne à
propos de la Boétie), mais une spécification, voire une singularisation de la relation elle-même.Aucune amitié n'est semblable à une autre : chacune
est unique, irremplaçable et éternellement libre. Cela vous semble évident ? Réfléchissez bien : pas tant que cela, surtout dans une culture dominée par l'image,
la confusion entre besoin et désir, et la standardisation des valeurs. Vouloir piéger l'amitié, ou l'amour du reste, dans l'abstraction ou dans des modèles normalisés, est voué à l'échec.
Dès l'instant où un discours sophistique ou une science prétendrait théoriser l'amitié et la faire entrer dans un jeu de catégories conceptuelles, de conjectures et de réfutations, elle a déjà
perdu son objet... pour ne s'occuper que d'un fantôme ou d'une trace.
Parenthèse [Un proche, sénégalais, musulman, Moktar, me disait il
y a deux jours, que l'Europe avait gagné le monde, mais perdu le sens social, et sans aucun doute le sens de l'amitié...
Aristote plaçait l'amitié au sommet de son éthique. Tous les grands maîtres de sagesse, dans les religions et spiritualités
orientales et occidentales, enseignent la valeur initiale et initiatique de l'amitié. Les grands maîtres, j'entends, pas les petits ! Il
existe en effet de petits, tout petits prétendus "maîtres spirituels" qui ont enseigné le contraire et fait de tout petits ridicules disciples qui se sont fait grossement entendre et qui ont
engendré de gros dégâts dans les consciences. Un jour, j'ai entendu sur France Culture un penseur raisonnable, agnostique de surcroît (ô surprise !), affirmer que "l'amitié n'était
pas une valeur judéo-chrétienne". J'ai bondi au plafond : de Moïse dans la nuée ardente, il est écrit que Dieu et Moïse se parlaient comme un ami parle à son ami. D'Abraham, Paul de Tarse dit
qu'il était l'ami de Dieu. Une grande partie des aventures bibliques sont des histoires d'amitiés et de libertés, parfois brisées, souvent sublimées. Quant à Jésus, il affirmait au soir de sa
vie à ceux qui l'avaient accompagné (traîtres, pleutres, dégonflés compris...) qu'il ne les appelait plus disciples, mais amis. L'amitié participe de
l'essence divine. Elle est au coeur du mystère trinitaire.] Fin de la parenthèse
Si on accepte la dynamique de l'amitié telle que j'ai essayé de la faire passer, alors le verrou d'une
connaissance subtile et irréductible saute. L'authentique mystique a quelque chose à voir avec l'amitié.
Nous sommes loin, très loin, de l'espace formel, qu'il soit critique ou dogmatique, qu'il soit scientifique, systématique ou spéculatif, qui prétend exprimer la seule vérité.
Le Grand Colombier (1500 m) est la dernière montagne du sud du Jura
(géographiquement parlant, mais pas géologiquement). Elle est à 40 kilomètres au nord de Novalaise, où j'habite.
En début de semaine dernière, à la suite d'une chute vertigineuse dans un abîme insondable, chez moi (suis
tombé d'une chaise), je n'ai plus pu marcher durant six jours.
Alors samedi après-midi, pour une première sortie, avant un petit concert de
piano que je donnais dans un village du Bugey, Marignieu je suis monté au Grand Colombier où je ne m'étais plus rendu depuis plus de quinze ans. Je ne me souvenais pas que le
site était aussi beau : le belvédère sur les Alpes(des Dents du Midi -Suisse- jusqu'à la Meije -Écrins : 300 Km), les Lacs d'Aix les Bains et
d'Annecy, le Rhône, est un des plus beaux spectacles du coin.
Voici quelques photos pour vos fonds d'écran. (cliquer sur la photo pour un format 1200x900 Pour ceux que cela intéresse, je les ai dans un meilleur format et une meilleure résolution : je peux leur envoyer)
Le Grand Colombier, vu de Marignieu
Le Massif du Mont Blanc, dans les fleurs, depuis le sommet...
Marcher est une métaphore. La marche symbolise le mouvement philosophique et existentiel de toute personne qui accepte de se laisser interpeller par les événements de la vie et de l'esprit, de la
rencontre des hommes et des femmes.
J'ai toujours conçu mon propre cheminement philosophique comme une succession de marches et de pauses(ou comme une croisière sur un voilier, entre haute mer et mouillage).Le temps de la
marche est celui de l'exploration de pensées nouvelles, d'écoutes des événements, de rencontres interpellantes. Il s'agit aussi d'une mise en danger permanente, surtout quand, comme
moi, on aime flirter avec les précipices, c'est-à-dire côtoyer des penseurs déstabilisants et anxiogènes. La marche est le temps de la
liberté.
Le temps de la pause est celui des synthèses et du regard sur le trajet parcouru. Il
se manifeste à l'occasion d'un article ou d'un livre à écrire, d'une conférence ou d'un cours à donner, d'un séminaire à animer. Parfois, il se dévoile simplement dans le moment, au sens fort
du terme, de la contemplation. Le temps de la pause est un temps de bonheur.
Cela ne signifie pas que la marche ne soit pas aussi un temps de bonheur, ni que la pause n'ait pas sa saveur
de liberté. Mais d'un côté, dans le risque de la marche, il y a toujours une anxiété en relation avec un péril imprévisible qui se cacherait derrière un arbre ou dans un ravin. Et dans le repos,
s'agite parfois une petite appréhension de ne pouvoir repartir et se se laisser envoûter par quelque délice de Capoue. Liberté et bonheur ne font pas si bon ménage que l'on ne le dit !
*
Je vais donner un exemple, qui n'est en fait pas un exemple puisqu'il engage des convictions personnelles.
Depuis des années, j'appuie une grande partie de ma réflexion sur l'avenir de la Planète sur la pensée de Hans Jonas (*). Pas seulement le Hans
Jonas trop connu, et malheureusement trop réduit à son heuristique de la peur. Mais aussi le Hans Jonas d'une philosophie de la vie que je trouve extrêmement percutante et qui est
malheureusement moins connue. D'une certaine manière, Jonas a bâti un refuge sur la route de mon cheminement personnel, et je m'y complais peut-être un peu trop, comme un ami me l'a reproché un
jour.
Or, il m'a été demandé pour l'an prochain, dans le cadre de mon travail, d'animer un groupe de recherche autour de la pensée d'André Gorz.
Autre penseur de l'avenir de la Planète, de tradition à la fois marxiste et existentialiste, qui a su intégrer et dépasser ses maîtres.
Les deux philosophes ont le même fondement : la nature est fragile, les paradigmes de la société occidentale la détruisent. Comment penser demain ? Rien de très original jusque là. Mais avec Gorz,
la perspective est très différente : je dois donc quitter le refuge et repartir vers de nouvelles lignes de crêtes.
Un des lieux où Jonas et Gorz bifurquent, c'est sur le point d'appui de la responsabilité.
- Jonas met l'accent sur la responsabilité individuelle, que ce
soit celle dérivée de l'éducation reçue, celle de nos comportements quotidiens, celles des politiques. Changeons nos attitudes et notre échelle de valeur éthique, et le reste suivra.
Pour transformer nos habitudes, on connaît la fameuse injonction de la pensée de Jonas : faire peur, la peur (de l'avenir) nous secouera. Il y a dans ce
discours un vieux reste de culpabilisation judéo-chrétienne. Hans Jonas est naturellement plus nuancé car il a développé une phénoménologie de la
vie qui donne de l'appui à sa réflexion sur la responsabilité. Mais c'est ce discours sur la peur (et que je ne partage pas) qui reste ancré dans les cercles
philosophiques et les milieux informés.
- Gorz en revanche porte la responsabilité sur le système et les
structures socio-économiques. La crise écologique est avant tout un effet de la crise capitaliste. Il en appelle au citoyen. Il ne met pas en cause les personnes. Sa pensée n'est pas
culpabilisante, mais au contraire stimulante. La lucidité avec laquelle il a analysé les mécanismes de la crise présente, mais aussi l'aliénation du travail par rapport aux valeurs, est à la
fois virile, forte et d'une humilité que j'ai rarement lue chez un intellectuel (il n'hésite pas à dire qu'il s'est trompé à telle ou telle époque de son
itinéraire). Paradoxalement, en raison de l'approche systémique de sa pensée, la réflexion de Gorz est beaucoup plus dynamisante : elle propose un vrai projet de société que je ne
ressens pas chez Jonas.
Après avoir lu Jonas, ma première tentation est celle du repli sur soi. Après avoir lu Gorz, j'ai envie de faire la révolution. Chez Jonas, une fois digéré la tentation du repli, la méditation existentielle et ses appels à transformer notre
comportement finissent par prendre le dessus. Chez Gorz, une fois l'exaltation révolutionnaire passée, j'ai envie de m'investir dans les voies politiques qu'il
propose, au risque de me tromper de temps en temps.
Je ne jouerai pas l'un contre l'autre, ce serait une erreur de ma part. Ils sont tous les deux nécessaires. Je ne trouve en
effet pas beaucoup de métaphysique chez Gorz, ce que je trouve dommage, alors qu'il y en a une vertigineuse chez Jonas, inspirée d'une discussion à fleurets mouchetés avec la
phénoménologie de Heidegger... au point que cette métaphysique est enveloppante et parfois trop lourde. En revanche, il manque chez Jonas une analyse sociale et économique et un projet
d'avenir reposant sur du concret, que Gorz, lui, manie avec virtuosité.
Depuis quelques mois, je vis un état de repos, comme un marin allongé dans un hamac sur un voilier, au coeur d'une calanque. Un état de pause, au sens que je donnais
au début de cet article...... [début d'une parenthèse "'état d'âme" : cela en raison d'un rééquilibrage affectif
et existentiel extrêmement dense : découverte du simple bonheur de vivre la musique de l'instant présent, de me laisser porter par l'harmonie de l'infini et d'écouter les cadeaux de la vie -
fin de la parenthèse "état d'âme"]. Si on me parle écologie ou avenir de la planète, j'ai tendance à "jonasifier", maintenant que j'ai
bien intégré sa pensée. Le voilier, où je me repose aujourd'hui, doit peut-être s'éloigner des rivages jonasiens pour se rapprocher des rivages gorziens. La synthèse est en effet de nouveau
rompue. C'est reparti pour un nouveau voyage.
*
J'écris cet article dans un café au bord du Lac d'Aiguebelette, tandis que je regarde depuis la terrasse les championnats de France d'aviron... (où j'ai participé et où on m'a remis une jolie médaille d'or, ce matin, pour la course handisport ! (**). Le bateau qui gagne, sur
l'image ci-contre est celui du 4 sans barreur féminin de notre club ! Waouh !).
Le bonheur était dans le chocolat chaud que la charmante serveuse a déposé sur la table.
La liberté se retrouvera quand je repartirai.
(*) Je ne m'appuie pas que sur Jonas, heureusement. Par derrière, il y a toujours surtout
Moltmann, Teilhard, Morin et Whitehead et quelques autres... Jonas a juste l'avantage d'aborder directement les problèmes.
(**) Mais il y a eu un petit trucage : faut pas le dire !
Ceux qui accompagnent les marches de ce blog doivent estimer que je m'amuse à copier, à blasphémer ou parodier médiocrement, les rêveries du promeneur solitaire de l'ami Jean-Jacques. En d'autres
termes, des promenades dans des collines, des plaines, des bois, des montagnes, dans un esprit egocentro-romantico-sentimentalo-écolo-ectoplasmique... ce dont Voltaire se moquait, en remerciant
Rousseau de lui apprendre à aimer marcher à quatre pattes. Mais non, mais non, il n'y a pas que la campagne et la nature, même celle
qui entoure Grenoble. Toute promenade, donc également en ville, cache sous l'apparence banale ses mystères et ses vertiges. Tenez par exemple, cette visite de
la ville de Liège, dans la lointaine Belgique là haut dans le Nord, en compagnie de quelques complices. Si les liégeois ne se reconnaissent pas dans cette description, c'est qu'ils
sont aveugles...
Tout a commencé dans une grande banalité. Il faut trouver à se garer, sortir de la voiture sans se faire écharper
par les véhicules qui suivent, sans heurter avec la porte le piéton distrait. Bref, rien de très original. Notre guide, très pédagogue, nous entraîne dans de jolies rues, habillées d'élégantes
façades et de beaux bâtiments religieux, administratifs, historiques, malheureusement non ravalées. Obscure clarté qui sort des des
pots d'échappement. Pour l'instant, nous cheminons dans une ville qui ressemble à d'autres villes du Nord, de Lille ou Reims à Aix-la-Chapelle ou Bruxelles.
Nous nous engageons dans un dédale de rues piétonnes, plus calmes, plus curieuses
et nous débouchons sur la magnifique place Saint Lambert, à l'architecture trèséquilibrée. Elle semble aménagée en direction d'une animation hors circulation automobile, plus proche
de la vie. Comme il avait plu (ce qui arrive très rarement dans ces contrées), l'animation était inexistante. Dommage. Mais on pourrait imaginer ce lieu habité de peintres et dessinateurs,
d'artistes divers, de cracheurs de feu, de musiciens et autres saltimbanques oubliés.
Nous repartons dans des rues piétonnes et nous nous insérons dans une ruelle étroite qui mène à un surprenant
café, la "Maison du Pékèt". Fini de rigoler. L'ombre des ensorceleurs et des envoûteurs descend et recouvre les âmes candides. Le café Pékèt est un lieu
étrange, fantastique, composé de centaines, peut-être même de milliers de petites salles obscures, de toutes formes, avec murs de pierre aux teintes grises, roses et sombres, reliées par autant
d'escaliers retors et imprévisibles. Les tables de bois lourd (pas de liège ici), les bancs et les sièges ovales, rectangulaires, polygonaux, revèlent des silhouettes énigmatiques que
les lumières en contre-jour cachent aux regards curieux. Cela ajoute à la beauté souterraine des lieux une mystification inquiétante qu'Eugène Sue ou Edgar Poe n'auraient pu imaginer.Au détour d'un mur, surgit un puits de plusieurs centaines de mètres de profondeur où, j'imagine, on jette les clients indésirables
et les politiciens corrompus (très rares) qu'on recouvre de la boisson locale (voir ci-dessous) qui les dissout peu à peu.
On s'assied. Les serveuses et serveurs, seules aptes à circuler dans ce labyrinthe, filent silencieusement en
portant desplateaux de verres emplis d'un nectar aux couleurs étranges :le pékèt !Il s'agit d'un alcool
fort qui n'a rien à envier à la Chartreuse ou à la liqueur de Genepi, bien au contraire. On le sert habituellement avec un chalumeau crache-feu, tellement il est ardent et venimeux.
Les petits gosiers fragiles peuvent l'avaler, versé normalement dans des verres ordinaires.Autrefois, on devait utiliser des lance-flammes, des torches à pétrole ou à gaz. Je dois avouer :
c'est super bon et n'en ai pas suffisamment profité ! La carte en présente de tous les parfums et de toutes les couleurs.
Ce lieu incandescent recèle peut-être quelque repaire d'alchimiste ou d'apothicaire fabuleux, en train de manipuler de mystérieuses potions.
La promenade reprend : au milieu d'autres, une boutique d'artistes... où des
peintres jettent des formes colorées sur du verre ou du plexiglas, avec des commentaires imaginatifs : "Mozart", "piège d'étoiles", etc. Idée à exploiter...
Nous traversons un vaste marché (Marché "de la Batte") dont la rue est si longue, si longue, que, d'après une petite compagne, elle se prolonge jusqu'à Namur
à 80 Kilomètres. Si, si ! C'est vrai ! Je n'ai pas eu le temps de vérifier... Nous respirons les émanations de crèpes et de gaufres liégeoises si connues et si appétissantes. Mais abandonner le
goût du pékèt et de ses charmes au creux du palais aurait été un crime.
Un philosophe grinçant, Marx je crois, parlait de ces rêveries qui se terminent dans une farce. Je transpose :
le fantastique finit dans la bouffonnerie. Sur une place de Liège, les élus bien intentionnés (un mois avant les
élections) ont installé une "ferme" pour les petits citadins qui ne savent pas que le lait vient de la vache, la laine des moutons, les radis et les carottes de la terre. Ça
s'entasse et se bouscule, ça s'escalade les uns sur les autres, ça caresse les ânes et les veaux,ça distribue des tracts,ça s'extasie devant la truie et ses petits
gorets si mignons qui finiront en saucissons, en jambons, en pâtés et en escalopes...
À Liège, il est en train de se construire une gare splendide. Vue de
l'intérieur, l'architecture a quelque chose de cosmique, plus proche des épicycles et des rotationnels (*) farfelus de Ptolémée que des cercles concentriques de Copernic. Son créateur est
l'architecte espagnol Santiago Calatrava Valls qui a bâti la Gare Saint Exupéry à Lyon (d'où je
suis parti) et bien d'autres merveilles. La gare de Liège-Guillemins fait rêver de voyages et de lumières. Elle nous change de ces gares tellement fonctionnelles (la Gare du Nord à
Paris, par exemple) où l'on se perd, tellement c'est trop bien expliqué.
Allez visiter Liège. C'est une ville merveilleuse et paradoxale. Bon, je vous laisse : je dois envoyer la facture à la municipalité liégeoise pour article
publicitaire.
(*) Si un mathématicien est capable de m'expliquer ce qu'est un rotationnel, je lui en serais reconnaissant. J'ai demandé à des agrégés et des universitaires, ils
n'ont jamais été foutus de m'expliquer. Mais, pour frimer, ça fait bien dans un texte...
C'est l'époque de l'année où le Lac d'Aiguebelette est le plus
beau.
(à 3 Km en dessous de chez nous)
Voici quelques photos pour vos fonds d'écran.
La fameuse couleur "émeraude" du Lac est difficile à reproduire avec l'appareil photo d'un téléphone portable. Cliquez sur l'image pour l'avoir en grand
RECTIFICATIF : pour élargir le tableau, voici le Lac d'Allos, envoyé par mon ami (ex-flamand et néo-savoyard) Ghislain qui n'a
sans doute pas connu de lac d'une telle couleur à Ostende ou Antwerpen !
Par flemme, je n'ai pas cherché où se trouvait le Lac d'Allos. Pas loin d'ici certainement !
Bref, la Planète n'a pas fini de nous étonner... avant qu'on la bousille complètement !
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